Dans cette section et celle qui suit, nous allons étudier deux produits avec les vecteurs. Le premier est le produit scalaire, qui a comme résultat un nombre 1
D’où le nom : le résultat est un scalaire.
, le second est le produit vectoriel, défini pour les vecteurs dans \(\R^3\text{,}\) dont le résultat est un autre vecteur. Tous les deux nous seront extrêmement utiles par la suite.
Le produit scalaire est défini pour des vecteurs avec un nombre arbitraire de composantes. Cependant, dans le cadre de ce texte, nous utiliserons souvent les vecteurs à deux ou trois composantes. Afin d’alléger l’écriture 2
Et surtout puisque nous présumons que le lecteur ou la lectrice générique de ce texte a suivi un cours d’algèbre linéaire.
, nous exposons la théorie pour les vecteurs dans \(\R^n\text{,}\) nous laissons au lectorat le soin de faire les spécialisations aux cas \(n=2\) ou \(n=3\text{.}\)
Définition1.3.1.
Soit \(\va = (a_1, \ldots, a_n),\ \vb = (b_1,\ldots, b_n) \in \R^n\text{.}\) Leur produit scalaire est le nombre
\(\va \cdot (\vb + \vc) = \va \cdot \vb + \va \cdot \vc\) (distributivité du produit scalaire sur l’addition).
Remarque1.3.4.
Si le point \(P\) a pour coordonnées \((x,y,z)\text{,}\) alors le vecteur \(\vp=(x,y,z)\) est tel que \(\vp\cdot \vp = x^2 + y^2+z^2\text{.}\) Ceci revient, en vertu du théorème de Pythagore, à dire que la distance de \(P\) à l’origine est donnée par \(\sqrt{\vp\cdot \vp}\text{.}\) Ceci nous mène à la définition de la norme d’un vecteur.
Définition1.3.5.
Soit \(\va (a_1, \ldots, a_n)\in\R^n\text{.}\) Sa norme est la quantité
On dit d’un vecteur \(\va\) qu’il est unitaire si \(|\va|=1\text{.}\)
Exemple1.3.6.
Calculer la norme de \(\va = (1,-1,1)\text{.}\)
Solution.
On calcule d’abord \(\va \cdot \va = 1^2 + (-1)^2 + 1^2 = 3\text{,}\) de sorte que \(|\va| = \sqrt{3}\text{.}\)
On doit noter que certain(e)s auteur(e)s utilisent une double barre pour la norme, c’est-à-dire qu’ils écriront \(||\va||\) au lieu de \(|\va|\text{.}\) Aussi, il faut faire attention au fait que le symbole utilisé pour la norme est celui des valeurs absolues pour les nombres. Le contexte devrait dissiper le doute – si tant est qu’il y en ait – concernant cette notation : \(|\va| \) est la norme du vecteur \(\va\text{,}\) tandis que \(|a|\) est la valeur absolue du scalaire \(a\text{.}\)
Proposition1.3.7.
Soit \(\va \in \R^n\) et \(k\in \R\text{,}\) alors
En effet, en vertu de la Proposition 1.3.7, le vecteur \(\va'\) est unitaire et il pointe dans la même direction que \(\va\text{,}\) puisqu’il s’agit d’un multiple scalaire de celui-ci. On dit alors que \(\va\) a été normalisé.
Une des principales utilités du produit scalaire est son lien avec les angles, traduite dans le résultat suivant.
Théorème1.3.8.
Soit \(\va,\vb\in \R^n\) et \(\theta \in [0,\pi]\) l’angle formé par ces vecteurs (voir la figure ci-après). Alors,
Afin d’établir ce résultat, on calcule \(|\va-\vb|^2\) de deux façons différentes. La première consiste à calculer \(|\va-\vb|^2\) au moyen du produit scalaire, c’est-à-dire
Par ailleurs, la seconde façon de calculer \(|\va-\vb|^2\) fait appel à l’interprétation d’une norme comme distance et découle de la loi des cosinus pour les triangles.
Si l’on applique la loi des cosinus à un triangle dont un sommet est à l’origine et que deux côtés adjacents sont déterminés par les vecteurs \(\va\) et \(\vb\) (voir la figure ci-haut), le troisième côté est donné par \(\va - \vb\text{,}\) d’où
Le résultat du Théorème 1.3.8 permet d’utiliser le produit scalaire pour déterminer si deux vecteurs sont orthogonaux ou pas, c’est-à-dire si l’angle qu’ils forment est \(\frac{\pi}{2}\) 3
La notion d’orthogonalité a été généralisée aux ensembles de fonctions, par exemple. Ceci joue un rôle très important dans les mathématiques appliquées plus avancées. La généralisation du produit scalaire est celle d’un “produit intérieur”.
. De la même façon, on peut utiliser le produit scalaire pour calculer l’angle formé par deux vecteurs (le cosinus de cet angle en réalité). Notamment, si le produit scalaire est positif, il en va de même pour le cosinus, de sorte que l’angle est un angle aigu. Naturellement, un produit scalaire négatif signifie que l’angle est obtus.
Ceci nous permet de conclure que \(\vc\) est orthogonal à la fois à \(\va\) et à \(\vb\text{.}\) Étant donné que \(|\va|=|\vb|=\sqrt{1^2+1^2+0^2}=\sqrt{2}\text{,}\) le premier produit scalaire nous dit aussi que l’angle \(\theta\) formé par \(\va\) et \(\vb\) vérifie
\begin{gather*}
\cos\theta =\frac{\va\cdot\vb}{|\va|\,|\vb|}=\frac{1}{2}
\text{, de sorte que }
\theta =\frac{\pi}{3}.
\end{gather*}
Notons que si \(\va = (a_1,a_2,a_3)\) est donné, alors
de sorte que le produit scalaire peut servir à isoler les composantes d’un vecteur donné dans la direction des vecteurs de la base canonique.
Le même problème peut se poser pour d’autres directions. Voyons comment le traiter.
Étant donné deux vecteurs \(\va,\vb\text{,}\) on veut décomposer \(\va\) comme la somme d’un vecteur parallèle à \(\vb\text{,}\) qu’on appellera la projection de \(\va\) sur \(\vb\text{,}\) et d’un autre vecteur orthogonal à \(\vb\text{.}\)
Autrement dit, on veut trouver un scalaire \(\lambda\) et un vecteur \(\vw\) orthogonal à \(\vb\text{,}\) tels que
où la dernière égalité suit de ce que \(\vw\) doit être orthogonal à \(\vb\text{,}\) de sorte que \(\lambda = \frac{\va \cdot \vb}{\vb \cdot \vb} \text{.}\) Ceci étant, il suffit de poser \(\vw = \va - \lambda \vb\text{.}\) En effet, ce vecteur est orthogonal à \(\vb\text{,}\) puisque
Considérons l’énoncé suivant : “Si \(\va\ne\vZero\) et si \(\va\cdot\vb=\va\cdot\vc\text{,}\) alors \(\vb=\vc\text{.}\)” Si l’affirmation est vraie, prouvez-la. Si l’affirmation est fausse, donnez un contre-exemple.
Réponse.
Cette affirmation est fausse. Un contre-exemple est \(\va=\llt 1,0,0\rgt \text{,}\)\(\vb=\llt 0,1,0\rgt ,\vc=\llt 0,0,1\rgt \text{.}\) Alors \(\va\cdot\vb=\va\cdot\vc=0\text{,}\) mais \(\vb\ne\vc\text{.}\) Il y a beaucoup d’autres contre-exemples.
8.
Une bille est posée sur le plan \(ax+by+cz=d\text{.}\) Le système de coordonnées a été choisi de sorte que l’axe positif \(z\) pointe vers le haut. Le coefficient \(c\) est non nul et les coefficients \(a\) et \(b\) sont non tous nuls. Dans quel sens roule la bille? Pourquoi les conditions “\(c\ne 0\)” et “\(a,b\)” n’ont-elles pas toutes deux été imposées à zéro?
Réponse.
La bille roule dans le sens \(\llt ac,bc,-a^2-b^2\rgt\text{.}\) Si \(c=0\text{,}\) le plan est vertical. Dans ce cas, le marbre ne roule pas, il tombe tout droit. Si \(a=b=0\text{,}\) le plan est horizontal. Dans ce cas, la bille ne roule pas, elle reste immobile.
9.
Trouvez l’angle entre la diagonale d’un cube et la diagonale d’une de ses faces.
Réponse.
\(35.26^\circ\) ou \(90^\circ\) ou \(144.74^\circ\)
10.
Considérons les trois points \(O=(0,0)\text{,}\)\(A=(a,0)\) et \(B=(b,c)\text{.}\)
Esquisser, en une seule figure,
le triangle formé des sommets \(O\text{,}\)\(A\) et \(B\text{,}\) et
le cercle circonscrit pour le triangle (c’est-à-dire le cercle passant par les trois sommets), et
les vecteurs
\(\overrightarrow{OA}\text{,}\) de \(O\) à \(A\text{,}\)
\(\overrightarrow{OB}\text{,}\) de \(O\) à \(B\text{,}\)
\(\overrightarrow{OC}\text{,}\) de \(O\) à \(C\text{,}\) où \(C\) est le centre du cercle circonscrit.
Ensuite, ajouter l’esquisse et evaluer, à partir de l’esquisse,
la projection du vecteur \(\overrightarrow{OC}\) sur le vecteur \(\overrightarrow{OA}\text{,}\) et
la projection du vecteur \(\overrightarrow{OC}\) sur le vecteur \(\overrightarrow{OB}\text{.}\)