Section4.5Systèmes bidimensionnels et leurs champs vectoriels
Note : lectures supplémentaires dans [3] (partie de §6.2) et dans [2] (parties de §7.5 et §7.6).
Prenons un moment pour discuter des systèmes linéaires homogènes à coefficients constants dans le plan. L’étude du cas simple suivant permet de déduire beaucoup de choses. Supposons que nous utilisons les coordonnées habituelles \((x,y)\) pour le plan et que \(P = \left[ \begin{matrix}a \amp b \\ c \amp d \end{matrix} \right]\) est une matrice \(2 \times 2\text{.}\) Examinons le système
\begin{equation}
\begin{bmatrix} x \\ y \end{bmatrix} ' = P \begin{bmatrix} x \\ y \end{bmatrix} \qquad \text{ ou } \qquad \begin{bmatrix} x \\ y \end{bmatrix} ' = \begin{bmatrix} a \amp b \\ c \amp d \end{bmatrix} \begin{bmatrix} x \\ y \end{bmatrix}\text{.}\tag{4.5.1}
\end{equation}
Le système est autonome (comparez avec la Section 2.5), et l’on peut donc tracer un champ vectoriel (voir la fin de la Section 4.1). On pourra déduire l’apparence du champ de vecteurs et comment les solutions se comportent après avoir trouvé les valeurs et les vecteurs propres de la matrice \(P\text{.}\) Dans cette section, on suppose que \(P\) a deux valeurs propres et deux vecteurs propres correspondants.
Cas n\(^o\)1. Supposons que les valeurs propres de \(P\) sont réelles et positives. On trouve les vecteurs propres correspondants et on les trace dans le plan. Par exemple, prenons la matrice \(\left[ \begin{matrix}1 \amp 1 \\ 0 \amp 2 \end{matrix} \right]\text{.}\) Les valeurs propres sont 1 et 2, et les vecteurs propres correspondants sont \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 0 \end{matrix} \right]\) et \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 1 \end{matrix} \right]\text{.}\) Voir la Figure 4.5.1.
Supposons que le point \((x,y)\) est sur la ligne définie par un vecteur propre \(\vec{v}\) pour une valeur propre \(\lambda\text{,}\) c’est-à-dire que \(\left[ \begin{matrix}x \\ y \end{matrix} \right] = \alpha \vec{v}\) pour un scalaire \(\alpha\text{.}\) Alors,
\begin{equation*}
\begin{bmatrix} x \\ y \end{bmatrix} ' = P \begin{bmatrix} x \\ y \end{bmatrix} = P ( \alpha \vec{v} ) = \alpha ( P \vec{v} ) = \alpha \lambda \vec{v}\text{.}
\end{equation*}
La dérivée est un multiple de \(\vec{v}\) et pointe donc le long de la ligne définie par \(\vec{v}\text{.}\) Comme \(\lambda > 0\text{,}\) la dérivée pointe dans la direction de \(\vec{v}\) quand \(\alpha\) est positif et dans la direction opposée quand \(\alpha\) est négatif. Traçaons les lignes définies par les vecteurs propres et des flèches sur ces lignes pour indiquer les directions. Voir la Figure 4.5.2 ci-après.
On ajoute le reste des flèches pour le champ vectoriel et l’on dessine aussi quelques solutions. Voir la Figure 4.5.3 ci-après. Le graphe ressemble à une source avec des flèches en provenance de l’origine. C’est pourquoi ce type de graphe se nomme un nœud répulsif ou parfois nœud instable .
Cas n\(^\text{o}\)2. Supposons que les deux valeurs propres sont négatives. Par exemple, prenons \(\left[ \begin{matrix}-1 \amp -1 \\ 0 \amp -2 \end{matrix} \right]\text{,}\) la négation de la matrice du cas n\(^\text{o}\)1. Les valeurs propres sont \(-1\) et \(-2\text{,}\) et les vecteurs propres correspondants sont les mêmes, soit \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 0 \end{matrix} \right]\) et \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 1 \end{matrix} \right]\text{.}\) Le calcul et le graphe sont presque identiques. La seule différence, c’est que les valeurs propres sont négatives et que les flèches sont donc inversées. La Figure 4.5.4 montre le résultat. Ce type de graphe se nomme un nœud attractif ou nœud stable .
Cas n\(^\text{o}\)3. Supposons une valeur propre positive et une négative. Par exemple, la matrice \(\left[ \begin{matrix}1 \amp 1 \\ 0 \amp -2 \end{matrix} \right]\text{.}\) Les valeurs propres sont 1 et \(-2\text{,}\) et les vecteurs propres correspondants sont \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 0 \end{matrix} \right]\) et \(\left[ \begin{matrix}1 \\ -3 \end{matrix} \right]\text{.}\) On inverse les flèches sur une ligne (correspond à la valeur propre négative) et l’on obtient le graphe de la Figure 4.5.5. Ce type de graphe se nomme un point selle ou point col .
Pour les trois prochains cas, on suppose que les valeurs propres sont complexes. Dans cette situation, les vecteurs propres sont également complexes, et l’on ne peut pas simplement les tracer dans le plan.
Cas n\(^\text{o}\)4. Supposons que les valeurs propres sont purement imaginaires, c’est-à-dire, supposons, que les valeurs propres sont \(\pm ib\text{.}\) Par exemple, prenons \(P = \left[ \begin{matrix}0 \amp 1 \\ -4 \amp 0 \end{matrix} \right]\text{.}\) Les valeurs propres sont \(\pm 2i\text{,}\) et les vecteurs propres sont \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 2i \end{matrix} \right]\) et \(\left[ \begin{matrix}1 \\ -2i \end{matrix} \right]\text{.}\) Considérons la valeur propre \(2i\) et son vecteur propre \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 2i \end{matrix} \right]\text{.}\) Les parties réelles et imaginaires de \(\vec{v} e^{2it}\) sont
Toutes leurs combinaisons linéaires donnent des solutions différentes qui dépendent des conditions initiales. Remarquez que la partie réelle est une équation paramétrique d’ellipse. On observe la même chose pour la partie imaginaire et pour chaque combinaison linéaire des deux. C’est ce qui se produit, en général, quand les valeurs propres sont purement imaginaires. Donc, dans ce cas, on obtient des ellipses comme solutions. Ce type de graphe est parfois nommé un point centre . Voir la Figure 4.5.6.
Cas n\(^\text{o}\)5. Supposons que les valeurs propres complexes ont une partie réelle positive, c’est-à-dire, supposons, que les valeurs propres sont \(a \pm ib\) pour certains \(a > 0\text{.}\) Par exemple, prenons \(P = \left[ \begin{matrix}1 \amp 1 \\ -4 \amp 1 \end{matrix} \right]\text{.}\) Les valeurs propres sont \(1\pm 2i\text{,}\) et les vecteurs propres sont \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 2i \end{matrix} \right]\) et \(\left[ \begin{matrix}1 \\ -2i \end{matrix} \right]\text{.}\) On prend \(1 + 2i\) et son vecteur propre \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 2i \end{matrix} \right]\) pour calculer les parties imaginaires de \(\vec{v} e^{(1+2i)t}\) :
Remarquez \(e^t\) devant les solutions. Les solutions prennent de l’ampleur tout en tournant autour de l’origine. On obtient alors un foyer répulsif . Voir la Figure 4.5.7.
Cas n\(^\text{o}\)6. Finalement, supposons que les valeurs propres complexes ont une partie réelle négative, c’est-à-dire, supposons, que les valeurs propres sont \(-a \pm ib\) pour certains \(a > 0\text{.}\) Par exemple, prenons \(P = \left[ \begin{matrix}-1 \amp -1 \\ 4 \amp -1 \end{matrix} \right]\text{.}\) Les valeurs propres sont \(-1\pm 2i\text{,}\) et les vecteurs propres sont \(\left[ \begin{matrix}1 \\ -2i \end{matrix} \right]\) et \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 2i \end{matrix} \right]\text{.}\) On prend \(-1 - 2i\) et son vecteur propre \(\left[ \begin{matrix}1 \\ 2i \end{matrix} \right]\) pour calculer les parties imaginaires de \(\vec{v} e^{(-1-2i)t}\) :
Remarquez \(e^{-t}\) devant les solutions. Les solutions perdent de leur ampleur tout en tournant autour de l’origine. On obtient alors un foyer attractif . Voir la Figure 4.5.8.
La Table 4.5.9 résume le comportement de systèmes linéaires homogènes bidimensionnels pour une matrice non singulière. On rencontre parfois des systèmes où une des valeurs propres est nulle (la matrice est singulière), comme dans l’Exemple 4.1.2, et où les graphes sont légèrement différents (plus simples, d’une certaine façaon). Voir les exercices.
Table4.5.9.Résumé du comportement des systèmes linéaires homogènes bidimensionnels
Valeurs propres
Comportement
réelles et les deux positives
nœud répulsif/nœud instable
réelles et les deux négatives
nœud attractif/nœud stable
réelles et de signes opposés
point selle/point col
purement imaginaires
point centre/ellipses
complexes avec une partie réelle positive
foyer répulsif
complexes avec une partie réelle négative
foyer attractif
ExercicesExercices
1.
Prenez l’équation \(m x'' + c x' + kx = 0\) avec \(m > 0\text{,}\)\(c \geq 0\) et \(k > 0\) comme système masse-ressort.
Transformez-la en système d’équations de premier ordre.
Pour quels \(m,
c\) et \(k\) obtenez-vous quel comportement?
Pouvez-vous expliquer intuitivement pourquoi vous n’obtenez pas tous les types de comportements?
2.
Que se passe-t-il si \(P = \left[ \begin{matrix}1 \amp 1 \\ 0 \amp 1 \end{matrix} \right]\text{?}\) Dans ce cas, la valeur propre se répète et il n’y a qu’un vecteur propre indépendant. Quel est le type de graphe?
3.
Que se passe-t-il si \(P = \left[ \begin{matrix}1 \amp 1 \\ 1 \amp 1 \end{matrix} \right]\text{?}\) Est-ce que ça ressemble à un des graphes vus précédemment?
4.
Quels comportements sont possibles si la matrice \(P\) est diagonale, c’est-à-dire \(P = \left[ \begin{matrix}a \amp 0 \\ 0 \amp b \end{matrix} \right]\text{?}\) Supposez que les éléments \(a\) et \(b\) sont non nuls.
5.
Prenez le système de l’Exemple 4.1.2, soit \(x_1'=\frac{r}{V}(x_2-x_1)\) et \(x_2'=\frac{r}{V}(x_1-x_2)\text{.}\) Comme on l’a précédemment mentionné, une des valeurs propres est nulle. Quelle est l’autre valeur propre, à quoi ressemble le graphe et que se passe-t-il quand \(t\) tend vers l’infini
6.
Décrivez le comportement des systèmes suivants sans les résoudre :
a) Deux valeurs propres: \(\pm \sqrt{2}\text{,}\) donc le comportement est une selle. b) Deux valeurs propres: \(1\) et \(2\text{,}\) donc le comportement est une source. c) Deux valeurs propres: \(\pm 2i\text{,}\) donc le comportement est un centre (ellipses). d) Deux valeurs propres: \(-1\) et \(-2\text{,}\) donc le comportement est un puits. e) Deux valeurs propres: \(5\) et \(-3\text{,}\) donc le comportement est une selle.
7.
Supposez que \(\vec{x}\,' = A \vec{x}\) où \(A\) est une matrice \(2 \times 2\) avec des valeurs propres \(2\pm i\text{.}\) Décrivez le comportement.
Réponse.
Spiral source.
8.
Prenez \(\left[ \begin{matrix}x \\ y \end{matrix} \right] ' = \left[ \begin{matrix}0 \amp 1 \\ 0 \amp 0 \end{matrix} \right] \left[ \begin{matrix}x \\ y \end{matrix} \right]\text{.}\) Tracez le champ de vecteur et décrivez le comportement. Correspond-il à un comportement préalablement observé?
Réponse.
The solution does not move anywhere if \(y = 0\text{.}\) When \(y\) is positive, the solution moves (with constant speed) in the positive \(x\) direction. When \(y\) is negative, the solution moves (with constant speed) in the negative \(x\) direction. It is not one of the behaviors we have seen.
Note that the matrix has a double eigenvalue 0 and the general solution is \(x = C_1 t + C_2\) and \(y = C_1\text{,}\) which agrees with the description above.